Tuesday, September 29, 2009

Guinée - Moussa Dadis Camara - ONU - Union africaL'ONU et Bruxelles condamnent la violence de la répressionine - Union européenne




Mardi 29 septembre 2009

Au lendemain d'une manifestation anti-junte réprimée dans le sang, l'ONU et l'Union européenne appellent les autorités guinéennes à respecter l'état de droit. Au moins 157 opposants ont été tués lors du rassemblement. Mardi 29 septembre 2009
Quelques heures après avoir violemment réprimé, lundi, une manifestation d’opposants dans les rues de Conakry, la capitale de la Guinée, les militaires se sont chargés de faire le ménage.




» "Les forces de l'ordre ont encerclé le stade et ont commencé à tirer", Fode Sanikayi Kouyate, étudiant, Conakry
"Un camion est venu pour ramasser des dizaines de corps" emmenés vers "des destinations inconnues", témoigne anonymement à l’AFP un médecin de l’hôpital Ignace-Deen de Conakry. Un membre de la Croix-Rouge a, d’autre part, évoqué une "volonté de dissimuler les corps des victimes".



Ces corps sont ceux de dizaines de manifestants qui, avec des milliers d’autres, avaient bravé l’interdiction de se rassembler décrétée un peu plus tôt par la junte, au pouvoir depuis neuf mois. Munis de pancartes "A bas Dadis, à bas l’armée au pouvoir", les manifestants s’étaient dirigés vers le stade de Conakry pour marquer leur opposition à la probable candidature du chef de la junte, Moussa Dadis Camara, à l’élection présidentielle de janvier 2010.



"Une boucherie, un carnage"



"Il y a 87 corps qui ont été ramassés dans et autour du stade après le passage des militaires", a témoigné un responsable de la police, sous couvert de l’anonymat. "C’est la boucherie, c’est un carnage", a lâché un médecin dans un centre hospitalier.



Plusieurs témoins contactés par FRANCE 24 et RFI rapportent que de nombreux civils ont été tués à bout portant et des femmes violées par les forces armées. Trois leaders de l’opposition, dont les ex-Premiers ministres Cellou Dalein Diallo et Sidya Touré, ont été blessés. "Il y avait une volonté délibérée de nous éliminer […] nous, les opposants", a déclaré Sidya Touré, blessé à la tête à "coup de crosse". Après avoir été hospitalisés, les trois opposants ont pu regagner leur domicile, selon leur entourage.



Selon RFI, l’armée a poursuivi les manifestants dans les rues de Conakry, et des coups de feu ont continué à retentir dans la ville, plusieurs heures après l’évacuation du stade.



Interrogé par RFI, Moussa Dadis Camara a affirmé "être très désolé" de la mort de manifestants. "J’attends qu’on me fasse le point [sur le nombre de morts] pour savoir comment procéder", a-t-il ajouté.








La communauté internationale a vivement critiqué l’attitude excessive de l’armée. La France, ancienne puissance coloniale, a notamment condamné "avec la plus grande fermeté" cette "répression violente". L’Union africaine (UA), à l’instar des Etats-Unis, a exprimé "sa grave préoccupation face à la situation qui prévaut en Guinée".



Un militaire qui a pris goût au pouvoir



Jusqu’à présent, Moussa Dadis Camara s’était targué d’avoir pris le pouvoir "sans effusion de sang" en décembre 2008, au lendemain de la mort du président Lansana Conté, à la tête de la Guinée pendant 24 ans.



Le militaire avait, à l’époque du coup d’Etat, affirmé au reporter de FRANCE 24 Franck Berruyer qu’il n’avait aucune ambition présidentielle. "Nous n’avons aucune intention de nous éterniser au pouvoir, nous ne sommes pas des affamés de pouvoir", avait-il alors déclaré.



Entretien avec le journaliste guinéen Karim Kamara

Par FRANCE 24




Aujourd’hui pourtant, le militaire n’exclut pas de se présenter à l’élection qu’il a promis d’organiser en janvier 2010. "Je n’ai pas déclaré que je voulais être candidat, mais je suis dans un dilemme, a-t-il lancé, lundi, à RFI. Une partie de la population veut Dadis président, l’autre soutient ses propres leaders. C’est ça, la démocratie. Je vais organiser une sorte de consultation nationale pour savoir si je dois ou pas me porter candidat."



"Dadis Show"



L’homme, âgé de 45 ans, qui apparaît toujours en public vêtu d’une tenue de camouflage et d’un béret rouge, a arpenté pendant 17 ans les couloirs de l’administration militaire de son pays avant de prendre la tête de la junte.



Militaire à l’intendance, d’abord chef de la section carburant, puis directeur général des hydrocarbures de l’armée, il a participé activement à plusieurs mutineries en 2007 et en 2008. La première s’était soldée par la mort de huit soldats. Lors de la seconde, en mai 2008, 180 personnes avaient trouvé la mort au cours d’affrontements entre policiers et soldats, selon plusieurs ONG.



Son arrivée à la tête de la Guinée avait alors été saluée par une large partie de la classe politique et de la société civile, lassée d’un régime népotique rongé par la corruption et le trafic de drogue.



Mais l’espoir né au lendemain de la mort de Lansana Conté s’est rapidement écroulé. Chantre de la lutte anti-corruption, Dadis Camara est soupçonné de dépenser généreusement l’argent de l’État (il aurait dépensé l’équivalent de 110 millions d’euros en neuf mois, la moitié étant consacrée aux "dépenses de souveraineté"). Et les actions promises sont restées, à ce jour, lettres mortes.



Ses frasques et ses soudains accès de colère, diffusés en direct par la télévision guinéenne et surnommés les "Dadis Show", lui ont conféré une renommé douteuse dans toute l’Afrique de l’Ouest.

PAR ROGER KITEMOKO MAMBWENE
journaliste.

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