PAR ROGER KITEMOKO MAMBWENE ADA (MUSTAPHA)
ECLIPSE MAGAZINE ,TEL 00233 241343688
Une bonne dose d’espoir dans une épidémie qui s’étire. Le premier vaccin efficace contre Ebola est « à portée de main », a déclaré vendredi l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Le premier essai a démontré des résultats préliminaires très encourageants.
Le vaccin VSV-ZEBOV, développé au Canada, a pu être testé sur le terrain en Guinée en un temps record — moins d’un an — alors qu’il faut généralement près de dix ans pour qu’un vaccin arrive à ce stade de développement, soulignent plusieurs spécialistes. Intitulé « Ebola ça suffit », l’essai, entamé le 23 mars dernier, a été réalisé grâce une coopération internationale impliquant l’OMS ainsi que des experts de Norvège, de France, de Suisse, des États-Unis, du Royaume-Uni et de Guinée.
Joint en Guinée où il coordonne la mission de Médecins sans frontières (MSF), le Québécois Marc Forget accueille la nouvelle avec enthousiasme. « Nous sommes très contents des résultats de l’étude, à laquelle nous avons participé en vaccinant 1200 travailleurs de la santé de première ligne », a-t-il affirmé au Devoir en fin de journée. Au total, plus de 7000 personnes ayant eu des contacts avec des patients infectés ont reçu ce vaccin. Il a fonctionné dans 100 % des cas et entraîné peu d’effets secondaires.
Margaret Chan, la directrice générale de l’OMS, y voit quant à elle une « avancée très prometteuse », qui changera certainement la donne. Frank Plummer, l’ancien directeur du Laboratoire national de microbiologie à Winnipeg où le vaccin a été mis au point, se réjouit de cette percée : « Pour le laboratoire et toute l’équipe impliquée, c’est le couronnement de 15 ans de travail. C’est extrêmement gratifiant. » La ministre fédérale de la Santé, Rona Ambrose, a quant à elle félicité le « travail accompli par les scientifiques de l’Agence de la santé publique du Canada qui a mené à la mise au point du vaccin ».
Les essais cliniques fonctionnaient sur le principe de la vaccination « en ceinture ». L’hypothèse de base étant qu’en vaccinant les cercles de personnes en contact avec un sujet infecté, une « ceinture de protection » est ainsi créée, a indiqué le Norvégien John-Arne Røttingen, président du groupe de pilotage de l’étude.
Les participants à l’étude étaient séparés en deux groupes : 4123 personnes tirées au sort ont reçu le vaccin immédiatement après avoir été en contact avec une personne infectée par le virus Ebola. Les autres 3528 ont reçu le vaccin 21 jours plus tard, pour pouvoir comparer la réponse immunitaire des deux catégories.
Nombre de doses
Toutes les personnes à risque sont dorénavant autorisées à recevoir le vaccin immédiatement, a précisé l’OMS, sans qu’une campagne de vaccination massive soit prévue. Le VSV-ZEBOV sera plutôt utilisé selon cette méthode de vaccination en ceinture dans les zones touchées, ainsi qu’administré aux travailleurs de première ligne.
Le nombre de doses disponibles reste encore inconnu. Merck, la compagnie pharmaceutique responsable de développer et de commercialiser le vaccin s’est limitée à réitérer par voie de communiqué vendredi son engagement à « accélérer le développement, la production et, si homologué, la distribution du vaccin ».
« C’est le nerf de la guerre, j’aimerais tellement savoir où en est la production », s’est exclamé Marc Forget au bout du fil dans la ville de Conakry. MSF souhaite pouvoir utiliser le vaccin le plus vite possible, en l’inoculant plus largement autour des personnes infectées, soit « aux contacts des contacts », comme l’a expliqué le coordonnateur pour la Guinée.
Ce médecin québécois se garde toutefois de tout triomphalisme. « C’est comme si nous venions de recruter un joueur étoile très très prometteur dans notre équipe, mais tous les autres piliers doivent être réunis pour enrayer la maladie », illustre le médecin. Le vaccin sera donc un « un outil supplémentaire », en plus de la surveillance et des traitements améliorés.
Après l’urgence d’installer et de coordonner les centres de traitement débordants, la situation exige maintenant de minutieuses enquêtes pour retracer les chaînes de transmission. Aussitôt qu’un cas d’Ebola est confirmé, il faut trouver toutes les personnes susceptibles d’avoir été contaminées, un véritable casse-tête dans certains cas.
Il rapporte l’exemple d’un jeune étudiant en médecine, aujourd’hui décédé, entré en contact avec au moins une centaine de personnes. L’homme s’est déplacé dans la capitale guinéenne en taxi et en transport en commun, en plus de passer par plusieurs départements d’un hôpital avant d’être diagnostiqué et transféré au centre de traitement.
Le spectre du retour à la case départ n’est jamais loin, mais « le piège se referme sur le virus, les dernières chaînes sont en train d’être “ encapsulées ” », dit M. Forget. Ainsi, il a été possible de remonter le cours de la contamination dans 21 des 22 nouveaux cas confirmés en Guinée la semaine dernière. « Je me garde de crier victoire, car l’an dernier à pareille date l’optimisme régnait, avant que l’épidémie ne reprenne de plus belle », tempère-t-il systématiquement.
Après 16 mois de lutte contre le virus meurtrier, « les Guinéens n’en peuvent plus d’Ebola », soupire-t-il. L’annonce des résultats vendredi constitue tout de même « une poussée supplémentaire pour voir la lumière au bout du tunnel », selon lui.
11 300 morts
Il faut dire que les systèmes de santé ont été sérieusement désorganisés par l’épidémie dans la région. Au moins 500 professionnels de la santé en sont morts, selon les chiffres compilés par l’OMS. « Jusqu’à 10 % des victimes étaient des travailleurs de la santé. Dans des pays où les systèmes de santé étaient déjà hypothéqués, ces victimes représentent une grande partie du personnel médical qualifié », souligne M. Forget. Plusieurs personnes craindraient en outre de se rendre dans les hôpitaux pour soigner d’autres maladies, devenant des victimes collatérales de l’épidémie.
La plus grave épidémie depuis l’identification du virus a fait à ce jour près de 28 000 cas recensés, et au moins de 11 300 morts en Afrique de l’Ouest, concentrés dans trois pays principaux : la Guinée, la Sierra Leone et le Liberia.
ECLIPSE MAGAZINE ,TEL 00233 241343688
Une bonne dose d’espoir dans une épidémie qui s’étire. Le premier vaccin efficace contre Ebola est « à portée de main », a déclaré vendredi l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Le premier essai a démontré des résultats préliminaires très encourageants.
Le vaccin VSV-ZEBOV, développé au Canada, a pu être testé sur le terrain en Guinée en un temps record — moins d’un an — alors qu’il faut généralement près de dix ans pour qu’un vaccin arrive à ce stade de développement, soulignent plusieurs spécialistes. Intitulé « Ebola ça suffit », l’essai, entamé le 23 mars dernier, a été réalisé grâce une coopération internationale impliquant l’OMS ainsi que des experts de Norvège, de France, de Suisse, des États-Unis, du Royaume-Uni et de Guinée.
Joint en Guinée où il coordonne la mission de Médecins sans frontières (MSF), le Québécois Marc Forget accueille la nouvelle avec enthousiasme. « Nous sommes très contents des résultats de l’étude, à laquelle nous avons participé en vaccinant 1200 travailleurs de la santé de première ligne », a-t-il affirmé au Devoir en fin de journée. Au total, plus de 7000 personnes ayant eu des contacts avec des patients infectés ont reçu ce vaccin. Il a fonctionné dans 100 % des cas et entraîné peu d’effets secondaires.
Margaret Chan, la directrice générale de l’OMS, y voit quant à elle une « avancée très prometteuse », qui changera certainement la donne. Frank Plummer, l’ancien directeur du Laboratoire national de microbiologie à Winnipeg où le vaccin a été mis au point, se réjouit de cette percée : « Pour le laboratoire et toute l’équipe impliquée, c’est le couronnement de 15 ans de travail. C’est extrêmement gratifiant. » La ministre fédérale de la Santé, Rona Ambrose, a quant à elle félicité le « travail accompli par les scientifiques de l’Agence de la santé publique du Canada qui a mené à la mise au point du vaccin ».
Les essais cliniques fonctionnaient sur le principe de la vaccination « en ceinture ». L’hypothèse de base étant qu’en vaccinant les cercles de personnes en contact avec un sujet infecté, une « ceinture de protection » est ainsi créée, a indiqué le Norvégien John-Arne Røttingen, président du groupe de pilotage de l’étude.
Les participants à l’étude étaient séparés en deux groupes : 4123 personnes tirées au sort ont reçu le vaccin immédiatement après avoir été en contact avec une personne infectée par le virus Ebola. Les autres 3528 ont reçu le vaccin 21 jours plus tard, pour pouvoir comparer la réponse immunitaire des deux catégories.
Nombre de doses
Toutes les personnes à risque sont dorénavant autorisées à recevoir le vaccin immédiatement, a précisé l’OMS, sans qu’une campagne de vaccination massive soit prévue. Le VSV-ZEBOV sera plutôt utilisé selon cette méthode de vaccination en ceinture dans les zones touchées, ainsi qu’administré aux travailleurs de première ligne.
Le nombre de doses disponibles reste encore inconnu. Merck, la compagnie pharmaceutique responsable de développer et de commercialiser le vaccin s’est limitée à réitérer par voie de communiqué vendredi son engagement à « accélérer le développement, la production et, si homologué, la distribution du vaccin ».
« C’est le nerf de la guerre, j’aimerais tellement savoir où en est la production », s’est exclamé Marc Forget au bout du fil dans la ville de Conakry. MSF souhaite pouvoir utiliser le vaccin le plus vite possible, en l’inoculant plus largement autour des personnes infectées, soit « aux contacts des contacts », comme l’a expliqué le coordonnateur pour la Guinée.
Ce médecin québécois se garde toutefois de tout triomphalisme. « C’est comme si nous venions de recruter un joueur étoile très très prometteur dans notre équipe, mais tous les autres piliers doivent être réunis pour enrayer la maladie », illustre le médecin. Le vaccin sera donc un « un outil supplémentaire », en plus de la surveillance et des traitements améliorés.
Après l’urgence d’installer et de coordonner les centres de traitement débordants, la situation exige maintenant de minutieuses enquêtes pour retracer les chaînes de transmission. Aussitôt qu’un cas d’Ebola est confirmé, il faut trouver toutes les personnes susceptibles d’avoir été contaminées, un véritable casse-tête dans certains cas.
Il rapporte l’exemple d’un jeune étudiant en médecine, aujourd’hui décédé, entré en contact avec au moins une centaine de personnes. L’homme s’est déplacé dans la capitale guinéenne en taxi et en transport en commun, en plus de passer par plusieurs départements d’un hôpital avant d’être diagnostiqué et transféré au centre de traitement.
Le spectre du retour à la case départ n’est jamais loin, mais « le piège se referme sur le virus, les dernières chaînes sont en train d’être “ encapsulées ” », dit M. Forget. Ainsi, il a été possible de remonter le cours de la contamination dans 21 des 22 nouveaux cas confirmés en Guinée la semaine dernière. « Je me garde de crier victoire, car l’an dernier à pareille date l’optimisme régnait, avant que l’épidémie ne reprenne de plus belle », tempère-t-il systématiquement.
Après 16 mois de lutte contre le virus meurtrier, « les Guinéens n’en peuvent plus d’Ebola », soupire-t-il. L’annonce des résultats vendredi constitue tout de même « une poussée supplémentaire pour voir la lumière au bout du tunnel », selon lui.
11 300 morts
Il faut dire que les systèmes de santé ont été sérieusement désorganisés par l’épidémie dans la région. Au moins 500 professionnels de la santé en sont morts, selon les chiffres compilés par l’OMS. « Jusqu’à 10 % des victimes étaient des travailleurs de la santé. Dans des pays où les systèmes de santé étaient déjà hypothéqués, ces victimes représentent une grande partie du personnel médical qualifié », souligne M. Forget. Plusieurs personnes craindraient en outre de se rendre dans les hôpitaux pour soigner d’autres maladies, devenant des victimes collatérales de l’épidémie.
La plus grave épidémie depuis l’identification du virus a fait à ce jour près de 28 000 cas recensés, et au moins de 11 300 morts en Afrique de l’Ouest, concentrés dans trois pays principaux : la Guinée, la Sierra Leone et le Liberia.
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